lundi 22 décembre 2008

Democratia — ou la naissance d'un blog européen

Lucia D'Apote a lancé son blog Democratia Europe au solstice d'hiver. Les élections européennes auront lieu dans six mois à peine, autour du solstice d'été... D'ici là, la campagne européenne, les candidatures européennes et le programme européen !
Les éphémérides sont avec nous, heureusement que les journées rallongent ;-)


Je connais un peu Lucia, pour l'avoir cotoyée lors des élections municipales de Strasbourg puis, pour avoir défendu avec elle (grâce à elle ?) une certaine exigence démocratique, une certaine idée du rassemblement aussi, lors des élections internes du Mouvement démocrate dans le Bas-Rhin. (cf ma 3ème fierté)

Son blog semble tourné tout entier vers la Démocratie Européenne et vers la vocation européenne de Strasbourg, comme siège unique du Parlement européen : rapatriement de TOUT le Législatif à Strasbourg, consécration de l'Exécutif à Bruxelles (la Commission) et du Judiciaire à Luxembourg.

Trias politica ! comme dirait Lucia.

Personnellement, j'ai hâte d'entendre les candidats du Grand-Est (de toutes tendances) se prononcer sur la vocation européenne de Strasbourg. Car certains semblent déjà jeter l'éponge (comme Daniel Cohn-Bendit ou Jean-Luc Bennahmias) tandis que d'autres restent sur la défensive, face à Bruxelles — Nathalie Griesbeck, la semaine dernière, est encore loin de m'avoir convaincu...

Strasbourg est la capitale démocratique de l'Europe. Le siège du Parlement doit y être défendu bec et ongles, avec conviction, mais aussi avec des idées neuves. À la suite de Nathalie Griesbeck, j'aimerais que Jean-François Kahn vienne nous donner sa vision de la place de Strasbourg sur l'échiquier européen, dès que possible.

Dans le Grand-Est, la vocation européenne de Strasbourg doit constituer le fil d'Ariane de la campagne européenne. Par son histoire, Strasbourg est le symbole de l'Europe réconciliée dont tous les artisans de la Paix dans le Monde ont su et sauront s'inspirer. Le Monde est dangeureux, l'Europe doit affirmer ses valeurs universelles pour les Droits de l'Homme, pour la Paix, pour le respect de la diversité culturelle, pour un développement durable, équilibré de nos sociétés, respectueux de notre Planète.

La campagne européenne est ouverte ...

Ci dessous, un petit film muet* illustrant la 1ère cession du Conseil de l'Europe à Strasbourg *, le 10 août 1949. Certains reconnaitront le Palais Universitaire de Strasbourg, Robert Schuman, Jean Monnet, Winston Churchill, Paul-Heni Spaak, etc.



* : film issu des archives http://www.ena.lu Mais qui donc a eu cette idée saugrenue, d'encapsuler de tels trésors de la mémoire européenne dans des formats propriétaires de type Flash etc. ? qui ne peuvent pas être partagés !

samedi 20 décembre 2008

Être MoDem : deux doutes et trois fiertés ...

Christophe Ginisty n'aime pas les chaînes... Paradoxe, c'est grâce à lui que je me mêle au troupeau de moutons de la dernière chaîne en date, celle lancée par lui-même, avant-hier ;-)

C'est Nelly qui m'a tagué à son tour, par l'intermédiaire de l'Hérétique. Comme chacun sait, je ne refuse jamais rien à Nelly — deux ou trois choses mises à part. Je m'exécute donc volontiers, dans l'ordre des joies et des peines du MoDem.

Sans attendre, j'invite à me suivre dans cet exercice périlleux :
  • Guillaume — Désolé Guillaume pour ce retour de bâton,
  • Danielle — Sorry but Fanal Safran c'est vraiment trop joli,
  • Philippe — Qui s'impatiente. Voilà voilà Philippe... ça vient !
  • Cédric — Ton blog s'endort, vice-Président, quoi de neuf ?
  • Last but not least, 1cognita — L'hiver approche, à quand l'ouverture de ton blog ?
Un mot d'abord pour éviter la dérive du téléphone arabe, quand le message initial se déforme, de bouche à oreille. Voici la demande initiale de Christophe, citée mot pour mot — chacun l'interprète comme il veut mais le message initial ne doit pas être déformé :

Je vous propose de donner 2 choses qui vous ont fait douter et 3 choses qui vous ont rendu fier d'être au MoDem. Un engagement politique n'est pas un long fleuve tranquille et il peut être intéressant de partager ses joies et ses peines. Pourquoi 3 pour et 2 raisons contre ? Eh bien parce que j'imagine que si vous êtes toujours militant, c'est que le positif l'a emporté sur le négatif. Non ? »

Alors voilà, c'est à mon tour.
Pour commencer, deux doutes :

J'aime douter. Mes doutes construisent mes convictions. Pour moi, le doute n'est pas négatif, il n'est pas synonyme d'hésitation ou d'incertitude. Le doute est méthodique, il interpelle l'esprit critique et la raison, contre la réaction épidermique et la précipitation. Sans le doute, il n'y a ni précaution, ni alerte. Le doute permet de repérer les écueils et les récifs où l'on s'échoue, immanquablement. Sans le doute, il n'y pas de chemin assuré, pas de conviction intime, pas d'engagement possible.

Le doute s'exprime par la critique. J'aime faire des critiques, des critiques constructives. Au point de passer pour un "emmerdeur" aux yeux du 'responsable com' du MoDem 67. Mais finalement, c'est très agréable de passer pour un emmerdeur, aux yeux d'un responsable com. Moi, je préfère citer Aragon : « Le doute (la critique), c'est la pédagogie de l'enthousiasme ».

En deçà du doute qui me motive, il y a le découragement. Je ne suis pas passé loin du découragement, lors des élections internes du Bas-Rhin en septembre. Quand les règles les plus élémentaires de la démocratie interne sont foulées au pieds par les 'démocrates' eux-même, ça fait mal, très mal. Ça décourage. Quand une commission électorale renonce à assumer sa fonction primordiale, celle d'assurer un scrutin équitable, ça fait désordre, forcément, chez un démocrate... N'y revenons pas, c'est du passé, il y a prescription. Mais pour l'avenir, tout reste à faire.

Mon deuxième doute n'est pas un découragement, mais un doute persistant, pas encore solutionné. Il s'agit de l'attitude du MoDem lors des élections locales. Comment gérer les alliances de second tour, sans donner l'image d'une strétégie purement opportuniste ? Pas facile... S'allier à Juppé à Bordeaux et à Aubry à Lille, au motif que l'un et l'autre sont des gens "sympas", je trouve ça un peu court... Le retour du boomerang n'est pas loin... Le MoDem doit construire un discours clair pour justifier la géométrie 'variable' de ses alliances locales. C'est loin d'être fait ! Ne nous endormons pas sur nos lauriers, n'attendons pas la veille des prochaines élections locales pour clarifier ce point ! Avec l'effort de tous, on a du pain sur la planche !

Trois fiertés, enfin : ces fiertés sont les miennes, pas celles des autres.

Primo — J'étais militant centriste avant d'avoir 18 ans. Au Centre des démocrates sociaux, puis au MJG (giscardien). Au milieu des années 80, mon parti (UDF) s'est fourvoyé avec le RPR dans des alliances contre nature, avec l'extrème droite. Aux élections municipales partielles de Dreux d'abord, puis aux élections régionales en Rhône Alpes et en région PACA. C'est dur d'être jeune militant centriste et de devoir tourner le dos à vos aînés, pour leur faire comprendre qu'ils se gourent, que l'idéal humaniste et européen est incompatible avec les alliances électoralistes avec le FN. J'ai rendu ma carte et j'ai milité à SOS Racisme, pour quelques temps. Profondément blessé par cet épisode, je n'ai retrouvé le goût d'un engagement politique que 20 ans plus tard, lors des Présidentielles de 2007. Mais je suis plutôt fier d'avoir assumé seul, cette désertion.

Secundo — La discussion sur le règlement intérieur, au siège du MoDem à la fin du printemps dernier. Bon nombre de militants MoDem ont trouvé ces discussions interminables et fatiguantes, au vu des polémiques interminables qu'elles ont suscitées. Pourtant, c'est l'honneur d'un mouvement démocrate d'assumer ce genre d'échanges, d'en prendre le risque pour élaborer tant bien que mal nos règles de vie commune. Bon nombre de Mouvements départementaux auraient pu s'en inspirer. Paris a été exemplaire. Le Bas-Rhin, comme d'autres et comme d'habitude, est resté à la traîne. Dommage.

Tertio — Ma troisième fierté n'est pas la moindre. C'est celle d'avoir défendu avec Lucia D'Apote une certaine exigence démocratique pour l'organisation du Modem dans le Bas-Rhin, lors des élections internes de septembre. Les dés étaient pipés, le vent n'était pas favorable, les règles démocratiques ont été bafouées, certes, mais le message est passé. Notre démocratie interne doit être irréprochable, tant pour la qualité de nos débats internes que pour nos modes de décision collective. Pour moi, le 1er impératif éthique est l'article 2 de notre charte éthique :
« Le Mouvement démocrate respecte en son sein les principes démocratiques qu’il promeut à l’extérieur, notamment information, participation, liberté du débat, transparence des décisions. »

PS :
siouplé, pour la 3ème chaîne de la semaine... OU-BLI-EZ MOI ! ;-)

jeudi 18 décembre 2008

Paroles détenues

On a beaucoup parlé de la liberté des médias, ces derniers jours.
On a beaucoup parlé des fondamentaux de notre démocratie :
  • l'état de droit,
  • la séparation des pouvoirs,
  • la liberté de la presse,
  • la liberté d'expression individuelle,
  • la qualité du débat public,
  • la qualité irréprochable de nos décisions collectives.
Mais on n'a pas parlé beaucoup... des Droits de l'Homme.
Un document exceptionnel vient combler cet oubli.
Une prison, vue de l'intérieur.
Le plus énorme : c'est en France, en 2008.
J'en reste bouche bée.
Mes commentaires seront pour plus tard.


La prison de Fleury-Mérogis filmée par des détenus
envoyé par lemonde.fr

PS : Mille excuses à Philippe et Julien, petits soldats de la Grande coord... Traiter d'un événement avec 10 jours de retard, ce n'est pas ma façon préférée d'envisager ce blog. J'espère qu'on fera mieux la prochaine fois. ;-)
Cela dit, j'ai quelques commentaires à faire sur le compte-rendu de notre dernière convention départementale. J'attends juste quelques retours d'infos de la part de notre Présidence et de notre Secrétariat départemental, qui tardent un peu... Mais je ne manquerai pas d'y revenir !


mardi 16 décembre 2008

« J'ai essayé de bouger l'Europe, mais l'Europe m'a changé »

Une quarantaine de militants du Mouvement démocrate étaient venus écouter Nathalie Griesbeck, député européen, hier soir au Parlement européen de Strasbourg.

Après nous avoir présenté rapidement les rouages des institutions européennes et après avoir donné son sentiment sur le bilan de la Présidence française de l'Union européenne, Nathalie Griesbeck s'est livré au jeu de quelques questions-réponses. Plusieurs questions concernaient le siège du Parlement européen à Strasbourg ; je suis resté sur ma faim quant à ses réponses, toujours sur la défensive et manquant cruellement d'ambition pour Strasbourg, capitale démocratique de l'Europe.
En une heure trente, l'affaire était réglée...

Évoquant le discours d'ouverture de la Présidence française il y a six mois, Nathalie Griesbeck rappelait que ce discours avait duré 3 heures 30, 'ce qui n'est pas le genre de la maison'... Je dois reconnaître qu'à l'époque, ce discours volontariste de Nicolas Sarkozy, retransmis en différé sur LCP, m'avait plutôt intéressé.

Ce matin, Nicolas Sarkozy revenait à Strasbourg pour livrer le bilan de la Présidence française. Après le non irlandais, après la crise géorgienne et la crise financière, les parlementaires européens lui ont accordé, toutes tendance confondues, un satisfecit plutôt mérité.

Ceux qui me connaissent, ceux qui lisent ce blog de temps à autre, savent que je ne suis pas suspect de complaisance ou d'indulgence sarkozyste... Pourtant, j'ai trouvé ce discours européen de Nicolas Sarkozy plutôt réussi, dans le fond plus que sur la forme :-)

Optimiste, j'en retiens une phrase, osant croire à la sincérité de cet aveu : « J'ai essayé de bouger l'Europe, mais l'Europe m'a changé. (...) ». Un regret toutefois, de taille : la question du siège du Parlement européen à Strasbourg n'a pas été évoquée.

[ ajout du lendemain ] Pour un propos moins consensuel, je recommande de caler cette vidéo sur 1:33:33 pour quelques éclairages dissonants de Daniel Cohn-Bendit sur les questions institutionnelles (Lisbonne, l'unanimité, le rôle du Parlement et de la Commission) et sur les questions économiques et environnementales.

Verbatim — Fin du discours * :

(...) Et enfin, je voudrais vous dire, à titre personnel, que moi, cette Présidence de six mois m’a beaucoup appris et que j’ai beaucoup aimé ce travail. Et pour dire les choses, je comprends que les parlementaires européens soient passionnés par ce qu’ils font, parce que lorsque que l’on a la chance, pendant six mois, de connaître et d’avoir à trancher des problèmes de 27 pays, on gagne en tolérance, on gagne en ouverture d’esprit et on comprend que l’Europe est sans doute la plus belle idée qui ait été inventée au XXème siècle et que cette Europe, on en a plus que jamais besoin.

J’ai essayé de bouger l’Europe mais l’Europe m’a changé. Et je veux dire une chose parce que je le pense profondément : je crois vraiment que chaque chef d’Etat et de gouvernement gagnerait à exercer de temps à autre cette responsabilité. D’abord, parce qu’il comprendrait que les problèmes qu’il connaît dans son pays ne peuvent bien souvent trouver de solution qu’en accord avec nos voisins. Il comprendrait qu’au-delà de ce qui nous différencie, il y a tellement de choses qui nous rapprochent et il comprendrait que, surtout quelque chose de plus important, c’est que c’est plus facile pour l’Europe d’avoir des grandes ambitions que de toutes petites ambitions.

Et la dernière chose que je crois au plus profond de moi-même, c’est qu’au Conseil européen, au Parlement européen, à la Commission européenne, c’est plus facile de faire aboutir des grands projets que des petits projets. Parce que les petits projets n’ont pas le souffle et la force nécessaire pour faire reculer les égoïsmes nationaux. Les grands projets, les grandes ambitions, les grandes idées, au nom de ces grandes idées et de ces grandes ambitions, on peut surmonter les égoïsmes nationaux. Alors, que l’Europe reste ambitieuse et que l’Europe comprenne que le monde a besoin qu’elle prenne des décisions. Quand on met la poussière sous le tapis, on se prépare des lendemains difficiles. Les problèmes, il faut les régler tout de suite et maintenant et ce n’est pas vrai que les institutions européennes empêchent la prise de décision. Ce qui empêche la prise de décision, c’est le manque de courage, le manque de volontarisme, c’est l’affadissement d’un idéal. Les décisions, on ne doit pas attendre Lisbonne, on ne doit pas attendre demain, on doit les prendre maintenant et je fais toute confiance à la Présidence tchèque pour assumer le continuum de la présidence. »

Pour le discours intégral en vidéo, cliquer ici.
Pour la transcription, ici.

lundi 15 décembre 2008

L'inculture chez les démocrates : mon pédigrée

M'étant fait harponné par Guillaume, j'ai décidé de faire preuve de bonne volonté ;-) et de ne pas briser la chaîne de l'inculture. Me suivrez-vous ? Je tente le tout pour le tout en essayant de réveiller deux blogueurs endormis, nos amis démocrates Anne et Thomas. Aux antipodes des blogueurs endormis, j'aimerais insister auprès de Laure et de Christophe pour qu'ils entrent dans la danse. Un petit tag collectif aussi pour Antonin et sa bande, au Libre du MoDem.

Voici donc quelques mots pour brosser le tableau de mon inculture, dans les grandes lignes, pour chacune des catégories requises :

Cinéma — Oui j'avoue, je hais la VO. Désolé, ça fait mauvais genre, je sais. Par conséquent, des pans entiers du cinéma mondial m'échappent, étant donné le peu d'efforts consentis par les distributeurs pour réaliser des doublages de qualité.

Depuis Méliès, la magie du cinéma, c'est le trucage. Alors je ne comprends pas cet intégrisme de la VO omniprésente. Rendre les films accessibles aux cinéphiles dans leur langue maternelle, aussi bien qu'en VOST, voilà un défi culturel de la mondialisation. Alors pourquoi cela fonctionne-t-il pour Steven Spielberg ou James Cameron et pas pour Ken Loach ou Woody Allen ? C'est du séparatisme socio-culturel, sous couvert de rentabilité financière.

Je ne vais pas au cinéma pour lire ; les bibliothèques et les librairies sont faites pour cela. Je maudis ces désordres typographiques qui gesticulent en bas de l'image et perturbent le cadre cinématographique. Je ne compte plus le nombre de films ratés pour avoir attendu, en vain, une VF.
La honte ! Shame on me !

Pour moi, la vraie voix de Woody Allen est celle de sa doublure. C'est la magie du cinéma.

Bon, j'ai promis de faire un effort pour réexaminer cette position peut-être trop tranchée sur la VOST des salles obscures... Avec le DVD et la vidéo on demand, l'alternative entre VOST et VF est moins brutale, plus conciliante. Alors j'irai louer La Vie des autres en support multilingue pour pouvoir, peut-être, me raviser ;-)

Littérature — Oui j'avoue, Comment parler des livres que l'on n'a pas lus est un de mes livres de chevet préférés.

En grand démocrate, je vénère les droits imprescriptibles du lecteur selon Daniel Penac et en particulier les 3 premiers : le droit de ne pas lire, le droit de sauter des pages, le droit de ne pas terminer un livre. J'en use et j'en abuse. À l'empilement vertical (des livres achetés trop vite et qui se font désirer) et à l'alignement horizontal de la bibliothèque (les livres lus et classés par préférence et catégories) je préfère l'empilement scabreux des livres échoués, retournés en accents circonflexes (les lectures qui traînent, les lectures en parallèle, les lectures abandonnées).

En démocrate exigeant, je complète les droits du lecteur selon Penac par : le droit de préférer les commencements (relire 36 fois les premières pages) le droit de corner les pages, le droit d'écrire dans les livres (sauf ceux empruntés à la bibliothèque) le droit d'ignorer les 4èmes de couverture, le droit aux boules Quiès à la saison de la rentrée littéraire, le droit de me moquer du barnum des prix littéraires, le droit de ne pas lire les critiques des livres dans les journaux (la république des lettres entre copains et coquins), parce que c'est beaucoup plus intéressant sur Internet.

Géographie — Oui j'avoue, mes professeurs d'histoire-géo au collège ont réussi à me dégouter de l'histoire et de la géographie. Traumatisé par un tableau à 5 colonnes comprenant les pays africains, leur drapeau, leur capitale, leur superficie et même leur population, tableau appris par coeur... et oublié aussitôt. Avec le dégoût de la géographie en prime. J'en ai fait des cauchemards. Les batailles de Napoléon ont dû subir le même sort : ingurgitées comme on gave une oie, et vomies aussitôt. Une horreur pédagogique dont j'ai gardé les séquelles jusqu'au début de l'âge adulte. J'essaie encore de me rattraper... C'est dire l'immensité de mon inculture en histoire-géo. On devrait interdire ce genre de violences faites aux enfants, et interner les coupables.

Mathématiques — En général, les snobs cultivés se vantent de ne rien connaître aux mathématiques, ou de ne pas savoir se servir d'un ordinateur. C'est de bon ton. Ils écrivent à la plume d'oie, ont re-re-lu tout Proust mais ne veulent rien connaître aux probabilités, aux logarithmes et à la théorie des catastrophes. Ils s'en vantent. Alors je veux bien étaler ici mon inculture mathématique, mais vous ne saurez pas si c'est du lard ou du cochon... Du coup, j'hésite ;-)

C'est un vrai drame culturel en France, ce séparatisme entre une culture noble et élitiste (littéraire, historique, philosophique) et une culture scientifique et technique, trop souvent considérée comme une culture de seconde zône. Peut-être est-ce aussi une des principales cause du déficit d'innovation en France ?

Cuisine — Ma méconnaissance des cuisines du Monde est insondable. Comme cuisinier, j'ai une bonne excuse : les ingrédients et les ustensiles sont difficilement accessibles et parfois introuvables. Comme gourmand, j'assume et j'en profite : les découvertes des saveurs lointaines sont infinies, et j'en raffole.

vendredi 12 décembre 2008

Seuls les plus pauvres paieront plein pot... [niches fiscales]

Les niches fiscales représentent chaque année 73 milliards d'euros de manque à gagner pour le budget de l'État, soit 27% des recettes de l'impôt sur le revenu. [source : Observatoire des inégalités ]

L'une de ces niches fiscales concerne particulièrement les adhérents des partis politiques. Au titre de l'article 200 du Code général des impôts, les dons et cotisations aux partis politiques ouvrent droit à une réduction d'impôts de 66%.

Mais on oublie trop souvent qu'en France, près d'un foyer fiscal sur deux n'est pas imposable au titre de l'IRPP... Par conséquent, les adhérents non-imposables paient leur cotisation plein pot alors que les adhérents imposables paient leur cotisation trois fois moins cher, en récupérant les deux tiers de la somme auprès des services fiscaux.

C'est une injustice fiscale ahurissante qui mériterait d'être dénoncée et réformée. Car au delà de la niche fiscale injustifiée, cette réduction d'impôts crée une iniquité profonde pour l'engagement politique des non-imposables et des plus pauvres.

Tous les démocrates devraient s'emparer de cette proposition de réforme, plutôt que de vanter cette réduction d'impôt inique dans leur appel à cotisation — et autres appels de fonds...

Une solution simple consisterait par exemple, à transformer cette réduction d'impôt en crédit d'impôt... Mais le bien-fondé de cette niche fiscale reste à mes yeux très discutable. Sans doute vaudrait-il mieux la supprimer tout simplement.

PS hors-sujet : une recommandation de lecture, Les Jeudis d'Edgar.

dimanche 7 décembre 2008

« J'ai fait mon travail de journaliste. (...) » — Enquête d'un honnête homme sur un scandale d'État

C'est un constat effrayant sur les 'dysfonctionnements gravissimes de notre démocratie' : l'enquête méticuleuse de Laurent Mauduit sur l'affaire Tapie, relayée ce matin par une excellente interview sur le blog de Christophe Ginisty.
À voir absolument — on peut cliquer ici :


Interview de Laurent Mauduit from Christophe Ginisty on Vimeo.

Je n'ai pas encore lu Sous le Tapie, le livre de Laurent Mauduit mais quelque chose me dit que ce bouquin va devenir pendant quelques jours le livre de chevet de tous les démocrates attentifs et scrupuleux. Car l'affaire Tapie est un formidable cas d'école sur les dérives les plus invraisemblables et les plus inquiétantes de notre démocratie, un certain laisser-faire qui, dans le monde de la finance nous a conduit à la catastrophe planétaire qu'on connait.

Le travail méticuleux de Laurent Mauduit semble aboutir à un diagnostic accablant et implacable sur les prémisses d'un certain délabrement démocratique en France. Où la séparation des pouvoirs la plus élémentaire depuis Montesquieu est gravement mise à mal. Où une 'commission arbitrale' se substitue au pouvoir judiciaire au mépris des intérêts de l'État et des contribuables.

Les mots sont crus pour stigmatiser les dérives révélées par l'affaire Tapie : démocratie de la barbichette, capitalisme de la barbichette dans l'opacité du 'système parisien' — je te tiens, tu me tiens... ou la république des copains et des coquins — son analyse de la prétendue 'impartialité' des trois membres de la commission arbitrale est édifiante... une démocratie malade, sans réels contre-pouvoirs, sans médias indépendants — voir les récentes menaces pesants sur la liberté d'expression de la blogosphère, les menaces sur l'indépendance et le financement de l'audiovisuel public ou encore, les risques de concentration et de dépendance accrue pour la presse écrite, en kiosque ou en ligne.

Au delà des remèdes à tous ces dysfonctionnements, il nous faudra consolider l'ordre démocratique en apportant de nouvelles garanties d'indépendance, à l'égard du pouvoir économique notamment mais aussi pour renforcer l'indépendance et le pluralisme du contre-pouvoir médiatique — Christophe reviendra plus tard sur cet autre aspect de l'itw de Laurent Mauduit.

vendredi 5 décembre 2008

France Télévisions : tentative de mainmise ou sabotage ?

L'Assemblée nationale l'a décidé hier soir : le patron de France Télévisions sera nommé en Conseil des ministres et il pourra être révoqué de la même façon... Autant dire que le Président de la République s'en occupera lui-même.

Retour au bon vieux temps de l'ORTF...


Ce sont 35 ans de progrès pour l'indépendance de la télévision publique qui volent en éclat. Petit rappel historique :
  • au début du mandat de Giscard en 1974, l'ORTF est éclatée en une multitude de sociétés autonomes maîtrisant chacune leur programmation : Radio France, Télévision Française 1 - TF1, Antenne 2 et France Régions 3. Trois sociétés techniques complètent le dispositif : la Société Française de Production - SFP, Télédiffusion de France pour le réseau hertzien - TDF et l'Institut national de l'Audiovisuel pour la recherche et les archives - INA

  • au début du mandat de François Mitterrand en 1982, une 1ère instance de régulation voit le jour : la Haute Autorité de l'audiovisuel. Elle a pour mission de garantir l'indépendance de l'audiovisuel public (elle nomme patrons des chaînes) et d'attribuer les nouvelles fréquences ouvertes aux radios privées et associatives. En 1986 puis en 1989, la Haute autorité change de nom pour devenir la CNCL puis le CSA. Voir quelques images d'archive sur le site de l'INA.
Face à la volonté de Nicolas Sarkozy de nommer lui-même les responsables de l'audiovisuel public, les critiques fusent de toutes parts, y compris au sein de la majorité. On murmure que le président de la commission qui a préparé la réforme, Jean-François Copé s'est éclipsé de l'hémicycle hier après-midi, pour ne pas prendre part au vote de cet épineux article...

Mais malgré l'amendement prévoyant l'avis conforme de l'Assemblée nationale à la majorité qualifiée, la nomination du président de France Télévision par le pouvoir exécutif reste très controversée.

Qui peut croire en effet que 3/5ème des députés puissent s'opposer ouvertement au Président de la République alors que dans notre système institutionnel, les députés de la majorité doivent leur élection au chef de l'État élu quelques semaines plus tôt ?

Un sursaut citoyen est-il encore possible pour contrecarrer ce projet extraordinairement régressif ? L'hebdomadaire Marianne semble le croire en lançant aujourd'hui un appel pour le pluralisme et l'indépendance des médias.


On peut signer la pétition en ligne en cliquant sur la Une ou ici.

Reste à savoir s'il n'y a pas d'intention plus funeste dans cette réforme ? Je le crains. Car l'arrêt de la publicité passe désormais au second plan des critiques mais pourtant... Un transfert aussi brutal du financement comporte des risques incalculables sur la programmation et sur l'audience.

Sans aucune publicité, la télévision publique sera-t-elle encore en mesure de rivaliser avec les chaînes privées pour la retransmission de grands événements ? Aura-t-elle encore les moyens d'acheter les droits de retransmission des matchs de foot, par exemple ?

De fil en aiguille, ne risque-t-elle pas de s'enfermer dans un ghetto culturel, avec des retransmissions d'opéras ou de théâtre en début de soirée, des retransmissions de tournois d'escrime ou d'équitation le week-end, etc. ?

Sans une volonté politique forte, l'absence de publicité risque de reléguer sur le service public tout ce que les chaînes privées ne voudront plus faire. On peut craindre aussi l'effet boomerang d'un excès de publicité sur les chaînes privées — la 2ème coupure des films est déjà programmée...

En supprimant totalement la publicité des chaînes publiques, ne risque-t-on pas d'accentuer le séparatisme social et culturel des publics ? Ou de reproduire dans l'audiovisuel, les mécanismes de relégation urbaine de nos banlieues difficiles ?

Si la réforme du financement est trop brutale, les conséquences imprévisibles seront grandes. Un peu de prudence et de mesure permettrait pourtant de faire évoluer le financement progressivement, à l'image de la réforme engagée par Catherine Trautmann en 1998 — les critiques de l'opposition de l'époque sont assez croustillantes...

Au delà des critiques et des recommandations de prudence, restons aussi à l'écoute des propositions constructives. Ainsi par exemple, le forum Télévision et société au XXIème siécle organisé par Ars Industrialis et par le Collectif Enfance et Média au Théâtre de la Colline demain samedi.

Bernard Stiegler
y avance par exemple l'idée assez iconoclaste, de limiter la durée des tunnels de publicité, y compris sur les chaînes privées ! Aux antipodes de la réforme bâclée qu'on nous propose, sortie du chapeau des apprentis sorciers et des saboteurs cyniques.

dimanche 30 novembre 2008

L'appel de la Colline... aurait-il oublié les blogs ?

En marge des «États généraux de la presse» et du grand chambardement promis à l'audiovisuel public, Reporters sans Frontière et Médiapart ont allumé un contrefeu pour défendre la presse libre et indépendante en France, lors d'une soirée publique au Théâtre de la Colline *, le 24 novembre dernier.

À l'issue de cette rencontre, les professionnels présents — journalistes, sociologues des médias, juristes, enseignants en sciences politiques, etc. — ont rendu public un texte proclamant l'indépendance, la transparence et le pluralisme pour garantir la liberté de la presse et le droit à l'information du public citoyen.

Face au risque de concentration qui s'annonce pour la presse, face au risque de mainmise de l'exécutif sur l'audiovisuel public, il semble urgent de signer cette pétition, ici.

On peut regretter toutefois que les blogs ne soient pas mieux défendus à cette occasion. Car au delà de la 'presse numérique', c'est toute la blogosphère qui se trouve menacée par l'allongement du délai de prescription appliqué à la presse professionnelle.

Et que dire du curieux appel d'offre de 'Grandes oreilles' lancé par le Ministère de l'éducation nationale et de la recherche, révélé par Fabula début novembre, repris par Libération le 10 novembre et par Arrêt sur images la semaine dernière ? Ambiance...

Au delà de la lecture sur écran, le lecteur devient scripteur lui-même. À travers les commentaires d'abord et grâce aux blogs ensuite. Il est donc essentiel de garantir au citoyen blogueur les mêmes droits et les mêmes protections que la presse écrite, pour garantir sa liberté d'expression, jusque sur le Web.

Peut-être l'appel de la Colline a-t-il un peu manqué cet objectif ? C'est dommage.

jeudi 27 novembre 2008

Avis aux démocrates « électroniques »


Prononcer ...
[ i d e m o c R a t ] !

Ça y est, c'est ouvert ! La plateforme que Christophe Ginisty nous présentait à Cap Esterel début septembre vient d'ouvrir ses portes. C'est ici : http://www.e-democrates.fr/

Apparemment, le décollage est prudent, sans tapage. La montée en puissance va se faire doucement, tout doucement. Ça vaut mieux ;-)

Après une inscription sommaire, vous accédez aux ressources communes, les forums, les agendas à partager, les groupes départementaux, etc. Ça décolle tranquillement depuis trois jours... à peine une quinzaine d'inscrits dans le groupe du Bas-Rhin, par exemple. Me suis fais la main sur le calendrier des réunions locales, bien pratique :
http://www.e-democrates.fr/og_calendar/167/2008/12/01

Mais qui diable a choisi ce préfixe " e- " ? Ces manies de com' internationales, anglophones toujours, finissent par casser les pieds. Vous vous y voyez vous, en démocrates « électroniques » ? Moi, pas trop.

En revanche, les textes et les ressources en réseau impactent profondément l'organisation démocratique. Alors, pourquoi ne pas utiliser le préfixe " i- " d'Internet plutôt que le " e- " d'électronique ?

On y gagnerait un peu en sens, me semble-t-il. Sans parler même de la dérive phonétique qui consiste à prononcer [ i ] un " e " !

À l'université d'été du MEDEF, François Bayrou avait ouvertement critiqué le titre "Think big" devant un parterre de chefs d'entreprises. J'avais trouvé ça courageux...

_ _ _

ERRATUM : dans un commentaire (ci-dessous) Christophe Ginisty nous précise que la plateforme e-Démocrates n'est pas celle qui été présentée et annoncée à Cap Estérel début septembre.
Avec la plateforme dédiée aux Commissions démocrates de Corinne Lepage, on comptera donc 3 supports distincts...

mercredi 26 novembre 2008

La démocratie interne & l'épaisseur du papier à cigarette...

Beaucoup de mal à comprendre les sarcasmes qui s'abattent sur le Parti socialiste depuis le 2ème tour de son élection interne... Certains commentaires me surprennent vraiment...

Hasardeux, présomptueux ou lapidaires, y compris dans la blogosphère MoDem — le dernier commentaire en date est ici. Dans un style vaguement plus humoristique, voir plutôt ici... et encore !

Ce n'est pourtant que le B.A.-BA de la démocratie interne qui a été âprement discuté au PS, et rien d'autre ! Il s'agissait simplement de garantir la sincérité du scrutin, c'est-à-dire de s'assurer que l'écart de voix entre les candidates était bien supérieur au risque d'erreur — erreurs de bonne foi ou éventuelles fraudes.

Tout démocrate sincère devrait rester vigilant et exigeant sur ce point. Disons que, malgré quelques pratiques "pas plus tricheuses que d'habitude" (dixit Pierre Moscovici), les militants du PS ont su rester vigilants et qu'ils n'ont pas failli.

Si mes souvenirs sont bons, les élections internes du MoDem en septembre n'ont pas été à ce point irréprochables*, pour que l'on puisse venir donner des leçons de démocratie interne au PS aujourd'hui !

Finalement, Martine Aubry aura devancé Ségolène Royal de 102 voix seulement, sur un total de 134.800 suffrages exprimés. Une analogie de groupe est plus parlante :

¶ — Si vous rassemblez un échantillon représentatif de 100 militants socialistes, vous obtiendrez exactement 50 soutiens de Martine Aubry et 50 soutiens de Ségolène Royal.

¶ — Si vous en rassemblez 10 fois plus, soit 1.000 adhérents socialistes, vous ne verrez toujours rien de la préférence exprimée par l'élection interne du PS : si l'échantillon est représentatif, vous obtiendrez très exactement 500 pro-Aubry et 500 pro-Royal, pas un de plus, pas un de moins !

¶ — Pour commencer à mesurer l'écart entre Martine et Ségolène, vous devrez rassembler au minimum 3.000 militants socialistes, tirés au hasard sur un échantillon représentatif.
Et sur ces 3.000 personnes, un seul militant fera la différence !
Vous obtiendrez :
- 1.501 partisans de Martine Aubry et
- 1.499 partisans de Ségolène Royal

Avantage Aubry ! Un pour 3.000... Autant dire que l'écart est fin comme une feuille de papier à cigarette...

En démocrate que je suis (que j'essaie d'être, tant bien que mal...), je comprends parfaitement que les équipes de Ségolène Royal et de Martine Aubry aient voulu s'assurer, dans une telle situation, que l'écart de leurs scores était bien supérieur au risque d'erreur ou au cumul des litiges !

Quoi de plus normal pour un démocrate ? Que ceux qui n'ont jamais failli avec les règles de la démocratie interne* leur jettent la première pierre...

Le gros bug me semble être plutôt du côté de la direction du PS qui n'a pas été fichue d'expliquer une chose aussi simple, aussi évidente à l'opinion publique et aux médias.

Reste à savoir qui a vraiment gagné le « bras de fer » — physique et médiatique. Car du côté de l'endurance et la ténacité, y'a pas photo...

Primo — La tenue du congrès socialiste 18 mois après la Présidentielle devait dégonfler la popularité de Ségolène Royal comme une baudruche... Mais contre toute attente, la motion signée par Ségolène Royal arrive en tête (29%).

Secundo — Puis, le renoncement de Bertrand Delanoë (25%) et son désistement en faveur de Martine Aubry (24%) devait laminer Ségolène Royal... Mais contre toute attente, Ségolène Royal arrive en tête du 1er tour avec 42,5% (elle améliore son score de plus de 12%). Avec le soutien de Delanoë, Aubry ne recueille que 34% (soit une déperdition de 15%).

Tertio — Et pour finir au deuxième tour, le désistement de Benoit Hamon (22,8%) devait assurer une victoire très confortable à Martine Aubry (34,7%) soit au moins 10% d'avance... Elle ne sera élue que d'un cheveu !

_ _ _

* : petit mémo des dysfonctionnements au MoDem 67 :
. iniquités flagrantes dans la diffusion des documents de campagne,
. non-respect de la séparation des pouvoirs,
. verrouillage des 3 élections entre elles,
. organisation quasi-industrielle du vote par procuration,
. huis clos sur les débats du conseil départemental élu,
. etc.
Commençons donc à balayer devant notre porte !

mardi 25 novembre 2008

Yann Wehrling rejoint les Démocrates !



( illustration : Yann Wehrling )


Une amie commune m'a soufflé l'info à l'oreille en fin d'après midi, à la librairie Kléber où j'étais venu écouter Emmanuel Todd présenter son dernier livre
« Après la démocratie »* :

Yann Wehrling vient de rejoindre le Mouvement démocrate. Et c'est une vraie de vrai... bonne nouvelle !

J'ai eu la chance de cotoyer Yann lors des élections municipales de Strasbourg où j'étais comme lui, colistier de Chantal Cutajar — il était numéro 2, ce qui n'avait pas manqué d'indisposer certains... Bref, c'est de la vieille histoire, tout ça ;-)

Personnellement, je me réjouis que Yann vienne renforcer le pôle 'écolo' du MoDem, aux côtés de Corinne Lepage et de Jean-Luc Bennahmias. Oui, je sais... Le terme 'écolo' finit par agacer certains... Mais moi, je l'aime beaucoup ce terme 'écolo'. Je le trouve bien plus signifiant que 'développement durable', non ?

À ceux qui voudraient en savoir un peu plus sur le travail et la personnalité de Yann, je recommande vivement la visite de son site d'illustrateur : c'est ici.

* : fiche de lecture ici-même, dans quelques jours.

mercredi 19 novembre 2008

Liberté de la Presse : planquez vos blogs, le Sénat attaque !

La semaine dernière, Mediapart, davduf|net et Rue89 nous alertaient sur une proposition de loi adoptée par le Sénat le 4 novembre et passée presque inaperçue à la veille des élections étasuniennes.

Sous le doux nom de Diffamations, injures et provocations commises par l'intermédiaire d'Internet (sic), cette proposition de loi envisage ni plus ni moins de soustraire les blogs à la loi sur la liberté de la Presse telle qu'elle s'applique aujourd'hui. Et s'agissant des blogs, autant dire que cette loi porterait atteinte à la liberté d'expression tout simplement, si elle était votée en l'état...

Plus exactement, le Sénat propose de modifier la loi sur la Presse pour contraindre spécialement la liberté d'expression sur Internet. Ainsi, le délai de prescription de 3 mois prévu pour protéger la Presse depuis 1881 serait porté à 12 mois pour les blogs, soumettant les blogueurs à de possibles poursuites judiciaires ou à des pressions d'auto-censure, durant 9 mois supplémentaires par rapport aux supports de presse 'classiques' — journaux, radios, télés.

Comment expliquer que le Mouvement démocrate et sa blogosphère orange n'aient pas encore réagi à cette atteinte portée à la liberté de la Presse sur internet et plus généralement, à la liberté d'expression sur les blogs ?

Explication rapide par cette vidéo de Mediapart :



Petit rappel historique :

Avec la liberté d'opinion et la liberté d'expression, la liberté de la presse est un principe démocratique fondamental.

Dès 1789, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen affirme dans son article 11 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ».

Puis, la loi sur la Liberté de la Presse de 1881 autorise tout un chacun à devenir éditeur de livres, éditeur de presse ou imprimeur, sans obtenir d'autorisation préalable.

En cas d'infraction (diffamation, injure publique, incitation à la haine, etc) le directeur de la publication est poursuivi ainsi que l'auteur en tant que complice. Toutefois, pour protéger la liberté d'expression de la Presse, un délai de prescription de 3 mois est prévu, délai au delà duquel l'auteur ne peut plus être ni poursuivi, ni condamné.

Rappelons aussi qu'il n'y a pas diffamation si l'auteur arrive à prouver la véracité de ce qu'il allègue.

Enfin, une jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l'Homme de 1999 précise : « La liberté d'expression vaut non seulement pour les informations ou idées accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture sans lesquels, il n'est pas de société démocratique. »

lundi 17 novembre 2008

Fabienne KELLER succèdera-t-elle à Jean-Pierre JOUYET ?

L'ancien maire de Strasbourg et sénatrice du Bas-Rhin Fabienne Keller pourrait succéder à Jean-Pierre Jouyet au secrétariat d'État aux Affaires européennes, selon la rubrique Chuchotements des Dernières Nouvelles d'Alsace ce matin.

Si la nouvelle est confirmée, gageons que l'ancien maire de Strasbourg saura défendre bec et ongles ;-) l'implantation définitive du siège unique du Parlement européen à Strasbourg, comme l'avait souhaité François Fillon à Copenhague *, fin mai.

Rappelons que deux pétitions sont en cours, pour la défense d'un siège unique à Strasbourg : Démocratie européenne et One City.

samedi 15 novembre 2008

Europeana ou quand l'Europe des projets avance !

Le 14 décembre 2004, Google annonçait le lancement d'un projet pharaonique : Google Book Search dont l'objectif est de numériser 15 millions de livres imprimés et de les rendre accessibles sur Internet, en partenariat avec de prestigieuses bibliothèques américaines et européennes.

Le défi lancé par Google était autant culturel qu'industriel. Conscient de cet enjeu majeur pour la diversité culturelle, Jean-Noël Jeanneney, président de la Bibliothèque nationale de France, fut le premier à organiser la riposte européenne au projet de Google.

Dès janvier 2005, il publie une tribune alarmiste dans le journal Le Monde sous le titre Quand Google défie l'Europe. Quelques mois plus tard, en avril, Jeanneney publie un essai pour esquisser les contours d'un projet européen de numérisation des livres : Quand Google défie l'Europe, plaidoyer pour un sursaut.

Jeanneney parvient à convaincre les autres Bibliothèques nationales européennes et surtout Jacques Chirac, Président de la République en exercice qui va réussir à convaincre lui-même la Commission européenne avec le soutien de Jean-Claude Junker qui présidait alors le Conseil européen. Dès avril 2005, le projet est sur les rails, avec le soutien de l'Allemagne, de l'Italie et de l'Espagne, de la Hongrie et de la Pologne.





Dès la semaine prochaine, Europeana permettra d'accéder à 2 millions d'œuvres numérisées. Puis 6 millions d'œuvres seront disponibles dès 2010, tous médias confondus : livres, films, presse, tableaux, œuvres musicales, manuscrits.

Contrairement à Google qui numérise les livres à la volée, sans aucun choix de collection, Europeana proposera en priorité les oeuvres fondatrices de l'histoire européenne, les oeuvres majeures du patrimoine culturel européen y seront accessibles dans les principales langues de l'Union. L'histoire des sciences et des techniques y tiendra une place privilégiée, également.

L'Europe des projets est en marche... et la bonne nouvelle, c'est que cette Europe-là, cette Europe concrète et utile, fait voler en éclat tous les préjugés de l'euroscepticisme. Ainsi la Britisch Library, les bibliothèques nationales du Danemark ou de la République tchèque, pourtant eurosceptiques, seront des contributeurs majeurs d'Europeana. Même la Suisse et la Norvège verseront des fonds numérisés dans les entrepôts d'Europeana ! Vingt-huit bibliothèques nationales y contribuent, seuls Malte, l'Irlande et l'Estonie restent à l'écart, pour l'instant.

Les serveurs d'Europeana et son staff administratif seront basés à La Haye aux Pays Bas. Notons enfin qu'Europeana ne se substitue pas, pour l'instant, au portail de TEL, The European Library, fédération de plus de 40 bibliothèques nationales européennes, au sens large du Conseil de l'Europe. TEL est un portail fédérateur qui n'offre pas de contenu numérisé en ligne (sauf ses Trésors bien connus) mais son périmètre est bien plus large que celui d'Europeana.

Rendez-vous donc le 20 novembre pour l'ouverture officielle d'Europeana. Vive l'Europe des projets concrets !

« Si c'était à refaire,
je recommencerais par la culture »

Jean Monnet (1888-1979)

mercredi 12 novembre 2008

La Bourse ou la vie, le chantage des marchés

J'emprunte au Parti communiste français cette affiche prémonitoire de janvier 2008 'La Bourse ou la vie, rendons l'argent utile' pour illustrer le texte des Gracques à paraître demain dans le journal Le Monde : La Bourse ou la vie, le chantage des marchés.

Car après tout, cette affiche du PCF pourrait bien servir d'étendard aux dirigeants du 'G20' qui se réuniront à Washington en fin de semaine ;-)

Espérons au moins que Nicolas Sarkozy, Henry Paulson* et consort trouveront une solution pour rendre l'argent de la finance moins nuisible, moins toxique, ce qui serait déjà un énorme progrès...

Retour au texte des Gracques donc, pour quelques mots de commentaire.

Faut-il y voir le signe de mon incompétence en macro-économie, ou le signe de notre impuissance collective ? Mais depuis le début de la 'crise', je m'intéresse beaucoup plus aux questions soulevées par les analyses, les tribunes libres et les reportages, qu'aux prétendues solutions qu'ils assènent. Et le texte des Gracques n'y échappe pas.

Parmi les cinq solutions qu'ils proposent, plus d'une enfonce des portes grandes ouvertes et en reste aux bons sentiments : un peu plus de régulation, siouplé... Avec une naïveté confondante, inquiétante même quand on sait que les Gracques rassemblent un bon nombre d'économistes de haut vol, la crème de la crème des anciens collaborateurs de François Mitterrand, Michel Rocard, Pierre Bérégovoy et Lionel Jospin.

Ainsi par exemple, la 1ère proposition des Gracques : mutualiser au profit du FMI et de la Banque mondiale, les gains que les États tireront des plans de sauvetage des banques, afin de financer l'aide au développement des pays du Sud.

C'est le futur de l'indicatif qui me laisse rêveur... Si l'intention de l'aide au développement est louable, qui peut croire aujourd'hui que les États tireront forcément bénéfice de ces plans de sauvetage vertigineux ? Je ne trouve pas l'ombre du début d'une réponse dans le texte des Gracques, si ce n'est cette curieuse analogie avec le temps des nationalisations. Je cite :

(...) Il n'est d'ailleurs pas certain que nos finances supportent une charge nette en fin de compte. Après tout, les nationalisations de 1981 ont été une bonne affaire pour les contribuables français, même si c'est pour de tout autres raisons que celles pour lesquelles elles avaient été décidées. (...)

C'est bien là tout le problème. Si les nationalisations ont été un acte politique choisi et assumé - que j'avais ardemment contesté, en son temps - les plans de sauvetage des banques sont d'une tout autre nature, comme le laisse entendre le titre même du texte des Gracques : la Bourse ou la vie. Je cite :

(...) Les marchés ont réussi la plus grande prise d'otages de l'Histoire ; ils ont posé un pistolet sur la tempe des Etats et des contribuables. Ne vous demandez plus ce que votre banque peut faire pour vous, demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre banque : la Bourse ou la vie... Les gouvernements ont cédé. Ils ont eu raison. Ils n'avaient pas le choix. (...)

Après un tel braquage à main armée, qui peut croire que les États et les contribuables récupèreront forcément leur mise, avec une plus-value ? Si un Prix Nobel d'économie passe dans les parages, les commentaires ci-dessous lui sont grand ouverts...

Les sommes engagées en couverture des banques sont gigantesques : 2500 milliards de dollars soit environ 2000 milliards d'euros dont 350 milliards d'euros en France, ce qui représente 10.000 euros par foyer fiscal c'est-à-dire 6 ans d'impôt sur le revenu !

Qui peut croire que les institutions financières ne vont pas profiter aux mieux de ces garanties colossales pour défendre leurs propres intérêts, en premier lieu ? Un tel matelas de sécurité, garanti sur le dos des contribuables, sera-t-il autre chose qu'une aubaine pour optimiser les profits des institutions financières, une fois leur survie assurée ?

Les pouvoirs publics sont-ils en situation de pouvoir obtenir la contrepartie du secours qu'ils apportent au monde de la finance déjantée ? Rien n'est moins sûr. Comment les États vont-ils faire pour négocier quoi que ce soit, maintenant que les garanties ont été apportées aux banques ? On n'est pas chez les Bisounours !

Dans l'océan de dérégulation dans lequel ils évoluent depuis des décennies, les acteurs financiers sont devenus des requins de la pire espèce. De véritables prédateurs comme on en a la preuve aujourd'hui...

D'ailleurs, Henry Paulson*, secrétaire du Trésor étasunien, ne vient-il pas de faire marche arrière aujourd'hui même, en renonçant à racheter les créances pourries des banques, les renvoyant ainsi à leurs propres responsabilités ?

Le Trésor des Étas-Unis semble préférer engager les fonds en haut de bilan pour prendre part aux actifs des banques fautives et participer activement aux décisions de leurs conseils d'administration ou de surveillance, en attendant un hypothétique retour à meilleure fortune. Les dirigeants européens feraient bien de s'en inspirer dare-dare, avant qu'il ne soit trop tard !

Deux autres propositions des Gracques ne cassent pas trois pattes à un canard :
¶ — Oui, il faut mieux surveiller les fonds propres des opérateurs non régulés (sic) pour limiter les risques qu'ils font prendre au système financier tout entier !
¶ — Oui, il faut placer les agences de notations privées sous contrôle public. Moi, j'appelle ça le B.A BA de l'impartialité. On ne peut être à la fois juge et parti, comme le sont les agences de notation, en toute impunité. C'est con comme la séparation des pouvoirs... Montesquieu, au secours !

La recommandation suivante des Gracques vaut son pesant de cacahuètes. Encore une litanie de bonnes intentions, sans l'ombre du début d'une solution concrète... Je cite :
¶ — Imposer à tous les opérateurs de marché des règles de rémunération de la performance tenant compte de la durée, et surtaxer fiscalement ceux qui ne les respectent pas.

Alléluia ! Bravo, c'est merveilleux. Juste un détail : comment fait-on ? Moi, je veux bien fiscaliser à 85 voire à 90% les rémunérations financières non réalisées 'dans la durée'. Mais sérieusement, faut-il scotcher les investisseurs dans la durée, au risque de les voir renoncer à leur engagement ?

Pour le financement de l'innovation par exemple, le capital d'amorçage et le capital développement sont deux choses différentes. L'hypothétique 'culbute' des investisseurs en capital risque est proportionnelle aux risques financiers qu'ils engagent. Quand ils perdent, ils perdent tout ou presque. Alors quand ils sortent gagnant ? Pas sûr que l'assomoir fiscal soit la meilleure solution puique leur risque est intrinsèquement lié à leur échéance de sortie... Et comment fixer la durée de référence pour analyser la performance ? Mystère et boule de gomme.

Voilà pour une première réaction à chaud, à la lecture de ce texte des Gracques, fort intéressant encore une fois, mais discutable. Sans doute y reviendrais-je dans les prochains jours, au gré des accouchements possibles de notre fameux 'G20' à Washington !

* : Sieur Henry Paulson, actuel secrétaire d'État au Trésor des États-Unis d'Amérique est également l'ancien dirigeant de la banque d'investissement Goldman Sachs...

MàJ du 14 novembre : on apprend ce soir que Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État aux Affaires européennes, va quitter le gouvernement pour rejoindre l'AMF, le régulateur des marchés financiers. Un Gracques à l'AMF... Wait & see !

samedi 8 novembre 2008

La HALDE épingle les discriminations dans les manuels scolaires

Au lendemain de l'élection de Barack Obama Président des États-Unis d'Amérique, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité – HALDE – vient de publier un intéressant rapport sur les discriminations et les stéréotypes dans les manuels scolaires.

Réalisée par des chercheurs* de l'université Paul Verlaine à Metz entre mars 2007 et juin 2008, l'étude analyse 3.097 représentations de la société provenant de 29 manuels scolaires de collège et de lycée, toutes disciplines confondues.

Cinq types de discrimination y sont clairement repérées.
Par ordre d'importance :

¶ – Les discriminations sexistes arrivent loin devant. Là où la Halde ne voit que des 'stéréotypes' (sic) j'observe plutôt des archaïsmes vieux de 20 ans au moins... Discrimination au travail : trop souvent encore, seules les femmes sont représentées à la maison, occupées à des tâches domestiques, quand les hommes travaillent. Les représentations inverses semblent introuvables.

Les chiffres sont indiscutables : 1.046 illustrations en milieu professionnel représentent des hommes quand seulement 341 illustrations représentent des femmes ! Et quand les femmes sont représentées professionnellement, elles occupent généralement des postes moins valorisants que ceux occupés par les hommes. Exemples typiques : le chirurgien et l'infirmière, le patron et la secrétaire, etc.

¶ – Les discriminations sur les origines semblent avoir la peau dure également. Les personnes d'origine étrangère sont plus fréquemment montrées dans des situations dévalorisantes ou de pauvreté. Et lorsque les manuels de géographie explorent le Monde, les situations de pauvreté ou de famine sont trop rarement contrebalancées par des situations de modernité, de développement et de réussite.

¶ – Les représentations du handicap brillent par leur absence, ce qui constitue une discrimination de fait. Les chiffres sont consternants : sur les 3.097 représentations étudiées, 25 seulement figurent des personnes en situation de handicap !

Et sur ces 25 illustrations seulement, plus de la moitié illustrent précisément le handicap : 12 représentations illustrent des pathologies à l'origine du handicap dans les manuel de SVT et 4 représentations illustrent... les Jeux para-olympiques !

Il reste donc à peine 9 représentations du handicap (sur 3.097...) dans des situations de vie quotidienne. Seule une approche scientifique et statistique pouvait mettre en lumière ce genre de problème. Comment favoriser l'intégration des personnes handicapées si les représentations du handicap sont totalement absentes des manuels scolaires ?

¶ – De la même façon, les 'séniors' (terme employé par la Halde) sont souvent associés à les problèmes de santé, d'isolement, de défiscience physique et d'inactivité, laissant à l'écart les représentations possibles de leur expérience, de leur engagement citoyen, bénévole ou même de leur rôle familial...

¶ – La dernière discrimination pointée est celle de l'orientation sexuelle. Sur les 3.097 représentations, aucune n'évoquerait l'homosexualité dans une situation de la vie quotidienne. La seule illustration concerne la Gay Pride. Pour consolider cette observation, il faudrait en toute logique dénombrer les représentations de l'hétérosexualité parmi les 3.097 illustrations, ce qui semble difficile à faire, évidemment.

Je laisse la conclusion à Louis Schweitzer, président de la Halde, lors d'une conférence de presse à Paris avant-hier :

Les manuels scolaires sont un domaine important pour en finir avec les discriminations car c'est là que les enfants reçoivent l'image que leur projette la société. (...)

On sait tous que les stéréotypes durent et ce que nous voulons, c'est un rythme de changement accéléré à l'image de ce qui se passe aux Etats-Unis, a-t-il confié. Dire que « le temps résoudra les problèmes » est une réponse inacceptable. (...)

Au même titre que la série télévisée américaine "24 heures Chrono" qui a montré un président des Etats-Unis noir quelques années avant qu'il n'y ait un candidat noir à la Maison Blanche, les manuels scolaires doivent être en avance sur le passé et faire apparaître comme normale l'égalité. (...)



mercredi 5 novembre 2008

M. Barack Hussein O. & Mlle Mame Ramatoulaye Y.

Le New-York Times retrouve ce soir le prénom complet du candidat démocrate à l'élection présidentielle des États-Unis d'Amérique :
Barack Hussein Obama was elected the 44th president of the United States on Tuesday, sweeping away the last racial barrier in American politics with ease as the country chose him as its first black chief executive. (...)


Comme beaucoup, la nuit dernière, devant la retransmission du discours de Barack Obama à Chicago, j'ai pleuré ;-)

Comme beaucoup, j'ai pensé à l'histoire contemporaine des États-Unis. À Rosa Parks, couturière noire refusant de céder sa place à un Blanc, dans un bus. C'était en 1955 ! Rosa avait réfusé de payer l'amende de 10 dollars et avait fait appel de cette condamnation devant un tribunal. J'ai pensé aussi à un jeune pasteur noir de 26 ans, inconnu à l'époque, à qui vint l'idée saugrenue de lancer une campagne de boycott de cette compagnie de bus... un certain Martin Luther King.

Un an plus tard, la Cour suprème des États-Unis abolissait les lois ségrégationnistes, les déclarant anticonstitutionnelles.

À peine plus d'un demi-siècle nous sépare de ces événements... L'élection de Barack Obama est d'abord l'exploit formidable de la démocratie américaine et la preuve de sa vitalité renaissante. Un exploit vertigineux en si peu de temps, qui serait peut-être impossible ailleurs, voire impensable... Dans notre vieille Europe, serions-nous capables d'un tel exploit nous-même ?

Pourtant, je m'étais tenu à l'écart de la Barack o'mania qui envahissait la blogosphère démocrate depuis quelques semaines. Car Barack Obama, tout ami démocrate qu'il est, restait fondamentalement pour moi, favorable à la peine de mort et à la vente d'armes aux États-Unis.

Bon d'accord, contrairement à Hillary Clinton, notre ami démocrate n'avait pas voté en faveur de la guerre en Irak. Et conscient de l'agravation sans précédent des inégalités sociales, il proposait le renforcement de la Sécurité sociale pour les enfants et pour les plus pauvres, en jouant carte sur table avec les 5% des États-Uniens les plus favorisés qui verront leurs impôts augmenter.

Wall Street vient d'ailleurs d'encaisser le coup : après l'euphorie saluant l'élection de Barack Obama à l'ouverture, le Dow Jones vient de replonger de plus de 5 points ce soir... Les temps vont être durs pour les Golden parachutes ;-)

Mais chez nous, qu'en est-il ? Une seule député d'origine métisse à l'Assemblée nationale. Aucun au Sénat... Ça n'en rend que plus suspect l'omniprésence de Rama Yade sur tous les plateaux de télévision depuis 15 jours, pour commenter la victoire annoncée de Barack Obama... J'aime beaucoup Rama Yade, et surtout ses coups de gueules salutaires contre ses collègues du gouvernement, lorsqu'il s'agit de défendre les Droits de l'Homme.

Mais qui a eu cette idée saugrenue de faire de Rama Yade la figure de proue de la Barack o'mania gouvernementale ? C'est ridicule. Ce genre d'exploit de communication est totalement contreproductif. Et la signature probable de Thierry Saussez n'y change rien. L'opinion publique n'est pas dupe de ce genre d'excès de com, qui en général revient à la figure de l'envoyeur comme un boomerang...

En France, le personnel politique est très loin de refléter la diversité de la société française. Et la sympathique Rama Yade, transformée en potiche des plateaux de télé depuis quelques jours, n'y changera rien.

Pire, il me semble qu'en France, le monde économique est encore très très en retard de ce point de vue, par rapport aux États-Unis.

Ah j'oubliais : Barack Obama s'oppose au principe de la discrimination positive... Thierry Saussez et Rama Yade pourraient faire passer le message à Nicolas Sarkozy, au moins !!!

« Yes we can ! »
Les États-Unis d'Amérique l'ont fait.
La France en sera-t-elle capable, un jour ?


lundi 3 novembre 2008

L'idéologie du laisser-faire, critiquée par Helmut Schmidt

Du haut de ses 90 printemps, Helmut Schmidt aurait-il trouvé les mots justes pour critiquer les dérives du capitalisme, sans jeter l'anathème sur le capitalisme en général ?

Dans un précédent billet, je signalais l'intervention remarquable de Michel Camdessus à la Conférence nationale du Mouvement démocrate, le 26 octobre. J'y épinglais au passage les propos de François Bayrou contre le capitalisme. Cette critique m'a valu une volée de bois vert par e-mail mais j'aurais préféré que cette discussion ait lieu à ciel ouvert, dans les commentaires.

Depuis, la blogosphère MoDem résonne de quelques billets écrits sous la bannière de... l'anticapitalisme ! Alors j'allume ici un contre-feu en signalant deux textes tout récents, fort intéressants :

Le premier est un billet de Jean Quatremer, journaliste à Libération, billet publié hier sur son excellent blog Les coulisses de Bruxelles. C'est une réponse argumentée à l'anticapitalisme primaire d'Olivier Besancenot : Crise financière, le n'importe quoi et le réel.

Le second est une interview d'Helmut Schmidt, ancien Chancelier de la République fédérale d'Allemagne publiée ce soir dans le journal Le Monde. Contrairement à F. Bayrou, H. Schmidt évite les anathèmes sur le capitalisme et préfère critiquer l'idéologie du laisser-faire... Il explicite ainsi le capitalisme rhénan fondé sur la régulation, en l'opposant au capitalisme de la dérégulation et du laisser-faire — l'ultra ou le néo-libéralisme comme dirait JF Kahn.

Le capitalisme n'est pas, intrinsèquement, synonyme de dérégulation et de spéculation financière. J'imagine que Michel Candessus aurait pu nous l'expliquer en trois phrases :) Outre la propriété des moyens de production, le capitalisme rhénan est fondé sur la régulation :
  • une vision à long terme des relations entre les acteurs économiques (fournisseurs, clients, employés) ce qui est le contraire de la spéculation financière,
  • des syndicats puissants, organisés démocratiquement et responsables
  • un haut niveau de protection sociale
  • un rôle modéré de la Bourse dans le financement des projets d'entreprise
Alors évitons les anathèmes contre le capitalisme en général, mais critiquons précisément ses dérives.